« Encore un nouvel outil de marketing pour promouvoir le back catalogue des Doors » pensez-vous en lisant ce titre. Oui, effectivement, le but de l’opération est clair, il s’agit de faire découvrir la musique des Doors à un public jeune et cool. Et… pourquoi pas?
Pour réaliser ce nouveau vidéo-clip, Warner et les membres survivants du groupe ont fait appel à des professionnels du skateboarding: Kenny Anderson, Alex Olson et Braydon Szafranski, des noms qui, de ce côté de l’Atlantique, ne nous parlent pas vraiment mais qui, aux Etats-Unis, sont de véritables stars du genre. Alors… j’en entends déjà certains râler sur le fait que le clip met en avant un sport qui n’était pas vraiment pratiqué à la grande époque des Doors dans la fin des années 60. Oui, c’est vrai… Mais l’esprit « rebel », « freedom », « street » du skateboarding n’aurait-il pas plu à Jim Morrison s’il était toujours vivant aujourd’hui? Il ne pourra évidemment pas répondre à cette question mais cette association ne semble pas si incompatible que ça. De toute façon, n’est-il pas plus appréciable de voir les efforts mis en place pour mettre la lumière sur le ‘back catalogue’ des Doors dans le cadre de ce 40ème anniversaire de « L.A. Woman » que d’assister aux prestations souvent pathétiques de Ray Manzarek et de Robbie Krieger et d’un pseudo Jim Morrison raté affublé d’un pantalon en cuir peu seyant? Donc, profitons de ce moment de musique et des belles images de ce nouveau clip… Pas si mal que ça, hein?
En décembre 1970, les Doors se retrouvent en studio pour enregistrer « L.A. Woman ». Sans leur producteur Paul Rotchild, les Doors se sentent pousser des ailes et un vent de liberté règne en studio. En effet, sur cet album, devenu aujourd’hui mythique, on retrouve un groupe privé des contraintes de productions qui joue exactement ce qu’il veut et qui rend un ici un fier hommage au son roots du blues…
« L.A. Woman » a été le dernier album enregistré par les Doors en compagnie de Jim Morrison. Autant le dire tout de suite, il s’agit du dernier véritable album des Doors. Certes Manzarek, Krieger et Densmore tenteront de continuer l’aventure sans leur leader charismatique, mais en vain…
« L.A. Woman » est le sixième album des Doors. Sa création ne se fera pas sans peine puisque le groupe connait alors quelques difficultés. Jim Morrison est devenu pratiquement « persona non grata » sur le territoire américain: il est accusé de « comportement indécent », « exhibition indécente », « outrage aux bonnes moeurs » et « ivresse publique » suite à un concert historique donné par le groupe à Miami le 1er mars 1969. Jim Morrison vit tout cela très mal et il est en train de sombrer dans une profonde dépression de laquelle il ne sortira malheureusement jamais. Les 3 autres membres du groupe, même s’ils se doivent d’être solidaire envers leur chanteur, ont du mal à pardonner à celui-ci d’avoir mis en danger l’avenir des Doors. Cependant, le temps passant, les 4 amis se remettent au travail. Ils ont envie de se faire plaisir et de revenir à leurs racines – le blues – et souhaitent proposer un album plus dépouillé, moins « produit » que les précédents. Paul Rotchild, producteur du groupe depuis ses débuts, ne l’entend pas de cette oreille-là. Il qualifie – avec mépris – les démos que lui proposent les Doors de « musique de cocktail »: pour lui, le groupe doit se concentrer sur d’autres compositions et ce projet n’a aucun avenir. Mais Morrison, Krieger, Manzarek et Densmore n’ont pas dit leur dernier mot: pas question d’abandonner « L.A. Woman »… Rotchild n’en veut pas? Qu’il aille au diable, ils le feront sans lui…
Morrison et ses 3 musiciens se lancent donc dans la production de cet album avec la collaboration de Bruce Botnick, leur ingé son depuis le début qui se hisse ici au statut de co-producteur de l’album. Pour enregistrer ce disque dans des conditions idéales, le groupe se rend dans sa salle de répétition très justement baptisée très « The Doors Workshop » située juste au-dessus du bureau administratif des Doors, au 8512 sur Sunset Boulevard à Los Angeles. Ici, pas question d’enregistrer le morceau en 30 prises ou instrument par instrument: l’essentiel de l’enregistrement se fait dans des conditions « live », les musiciens jouant ensemble, accompagnés par la voix de Morrison. Le résultat est splendide: on a l’impression de retrouver le groupe des débuts, celui qui nous avait proposé le somptueux album « The Doors » en 1967. Malheureusement, on connait la suite. Quelques mois plus tard, Jim Morrison s’envole pour Paris et il n’en reviendra jamais. « No One Gets Out Alive », « Personne ne s’en sort vivant », c’est vrai, mais à 27 ans, cela reste trop, bien trop tôt…
Warner vient de ressortir l’album pour son 40ème anniversaire. Encore, me direz-vous. Mais force est de constater que cette nouvelle version présente, cette fois, un réel intérêt. Outre d’être le 192ème remaster du catalogue, cette édition « 40ème » propose un second disque contenant des versions alternatives de la plupart des titres de l’album ainsi que les titres bonus « She Smells So Nice » et « Rock Me ». Les versions alternatives apportent un réel plus pour les fans car si l’album a déjà cet aspect direct et spontané qui en fait sa qualité, ces autres « takes » poussent la spontaneité encore un peu plus loin et on a parfois l’impression d’être dans les studios avec le
groupe tant elles ont un aspect intime et agréable.
Note: 4/5 (The Doors: L.A. Woman 40th Anniversary 2012/Warner)
Etta James, une des plus grandes chanteuses américaines, nous a quittés hier à l’âge de 73 ans. Jazz, blues, soul, rock’n’roll, R&B, gospel… Etta James maîtrisait tous les styles. Retour sur une brillante carrière…
De son vrai nom Jamesetta Hawkins, elle voit le jour le 25 janvier 1938 à Los Angeles. Son enfance n’est pas simple. Sa mère, Dorothy, jeune prostituée qui l’a eue à l’âge de 14 ans, refuse de lui dire qui est son véritable père. Fan absolue de jazz, sa mère lui donne le goût de la musique et lui apprend aussi à avoir une attitude « glamour ». Mais Jamesetta a du caractère et est bien décidée à prendre sa vie en main, seule. Adolescente, elle croise le chemin d’un certain Johnny Otis, un jeune impresario reconnu pour avoir popularisé le rhythm & blues (triste ironie de l’histoire, il nous a également récemment quitté ce 17 janvier). Très impressionné par les capacités vocales de la jeune chanteuse, Otis l’emmène en studio et lui fait enregistrer un premier titre « Roll With Me, Henry ». Johnny Otis en profite pour la baptiser « Etta James ». Bien plus qu’un nouveau nom, c’est également une nouvelle attitude qu’elle adoptera désormais. Elle expliquera dans son autobiographie: « J’avais vraiment envie de transformer la petite fille d’église Jamesetta Hawkins en ce personnage d’Etta James, cette salope dure et ferme. Je ne savais pas que j’avais ça en moi ». Mais même si cette image lui colle à la peau, la réalité n’est pas aussi simple: « Je donnais l’impression que j’avais parfaitement confiance en moi, que j’avais tout son contrôle mais en fait je crevais de trouille ».
Grâce au succès de « Roll With Me, Henry », Etta James devient presque instantanément une superstar. Il lui sera cependant difficile de gérer le succès à un si jeune âge et Etta James va malheureusement tomber dans toutes sortes d’excès, notamment une addiction à l’héroïne. Fragilisée, perdue, elle sera la souffre-douleur de certains de ses amants. Souvent victime de brutalités physiques, elle échangera – sur la route – les récits de cette terrible maltraitance avec deux compagnes musiciennes qui ne la comprendront que très bien: Aretha Franklin et Tina Turner, victimes également, à cette époque, de leurs maris abusifs.
Mais fort heureusement, Etta James sera souvent soutenue par ses amis et par certaines personnes du business. Leonard Chess, directeur du légendaire label Chess Records, tente de l’aider et prend en charge les frais d’un séjour en cure de désintox. Malheureusement, cela ne marche pas et Etta James reprend vite ses mauvaises habitudes. Suivront également quelques séjours en prison mais jamais elle n’abandonnera sa première et seule passion: la musique. Musique qui la guidera tout au long de sa vie : elle ne s’arrêtera jamais d’enregistrer, de donner des concerts…
On retiendra d’elle cette voix incroyable notamment sur le classique « At Last » ou encore sur sa version du « I Just Want To Make Love To You » de Willie Dixon que vous pouvez écouter ci-dessous…
Aujourd’hui, retour sur un titre du premier album solo de John Cale: « Amsterdam ».
Après son départ du Velvet Underground en 1968, John Cale va se consacrer à la production d’albums pour Nico ou encore pour les Stooges, le groupe d’Iggy Pop. Puis, en décembre 1970, soit un mois après la sortie du dernier véritable album du Velvet Underground (l’excellent « Loaded »), Cale va, dans son coin, sortir son premier disque solo, le très intéressant « Vintage Violence ». C’est sur ce disque que l’on trouve une belle ballade, « Amsterdam », signée par l’esprit torturé de John Cale, grand musicien et compositeur même si, humainement parlant, il peut s’avérer particulièrement décevant. J’en ai malheureusement fait les frais lors d’un entretien à la sortie d’un des ses albums à la fin des années 2000…
Vous pouvez écouter le titre sur Youtube ci-dessous
A noter également, la récente sortie d’une très intéressante autobiographie de John Cale que je vous recommande chaleureusement. Celle-ci évoque aussi bien son enfance difficile que sa carrière tant au sein du Velvet qu’en solo ainsi que son rôle de producteur des Stooges, de Nico, de Patti Smith ou encore de Jonathan Richman et des Modern Lovers.
« John Cale, une autobiographie » de John Cale et Victor Bockris
A propos de la formation et de son arrivée au sein des Beatles:
« Je connaissais les paroles de 25 titres rock, c’est ça qui m’a permis de rejoindre le groupe. Je connaissais des morceaux tels que ‘Long Tall Sally’ et ‘Tutti-Frutti’. Ca a été mon audition ».
Voici une sélection perso, et donc subjective, des meilleurs long tracks de l’histoire du rock… Il s’agit d’un article en plusieurs volets, le classement n’est pas qualitatif mais permet de proposer les titres par date de sortie.
Ce n’est pas parce que l’on enregistre un titre de 10 ou de 20 minutes qu’il s’agit d’un titre de qualité, bien au contraire, mais quelquefois, cette formule a fonctionné et a donné naissance à de véritables petits chef d’oeuvres, qui vous font voyager dans une multitude de sonorités, d’ambiances et d’émotions idéales pour de bonnes soirées d’écoute à la maison… Bon voyage …
Les meilleurs « Long Tracks » de l’histoire du rock (partie 2)
Moody Blues – The Afternoon (Tuesday Afternoon) (novembre 67)
« Tuesday Afternoon » est présent sur le second album des Moody Blues, « Days of Future Passed », un album aujourd’hui considéré comme l’un des albums fondateurs du rock progressif britannique. Disque culte donc, qui mariera avec beaucoup de brio le son du mellotron (cet étrange instrument très seventies) à celui d’orchestration classique et qui permettra au label Decca Records de « tester » son nouvel ‘sous-label’, « Deram Records », ainsi que sa technique d’enregistrement – révolutionnaire pour l’époque – le « deramic sound« . A noter également la présence sur ce même album du célèbre « Nights In White Satin », le slow par excellence, qui à l’époque deviendra la chanson la plus réclamée lors de mariages…
Iron Butterfly – In A Gadda Da Vida (juin 68)
Autre grand groupe issu de la scène « psyché » de Los Angeles représentée par les Doors ou encore Love, Iron Butterfly mettra notamment en avant le talent d’un très jeune guitariste, un certain Erik Brann âgé alors de 16 ans, ainsi que celui du claviériste Doug Ingle qui signera le titre. « In-A-Gadda-Da-Vida » est en fait la version de « In The Garden of Eden » mais prononcé par le claviériste sous l’effet de LSD, drogue très à la mode dans la fin des années 60…. C’est du joli … 😉
Procol Harum – In Held’ Twas In I (septembre 68)
Procol Harum, grâce à son second album « Shine On Brightly », va également faire partie de ces groupes qui – sans en avoir conscience – vont lancer le rock progressif en Angleterre. « In Held’ Twas In I » en est le plus bel exemple. Un titre mystique à souhait qui prendra également une dimension très intéressante et épique lors des concerts du groupe à l’époque. A écouter également : la version live issue de l’album « Procol Harum live with the Edmonton Symphony Orchestra » (enregistré en 71 et sorti en 72)
Rare Earth – Get Ready (août 1969)
Rare Earth ne laissera pas de grande trace dans l’histoire du rock mais un de ses morceaux va cependant faire beaucoup parler de lui à sa sortie. Il s’agit de cette reprise très inspirée du classique de Smokey Robinson qui va se transformer ici en une jam groovy du plus bel effet. Contrairement à ce qu’on peut lire parfois, Rare Earth ne sera pas le premier groupe blanc à être signé chez Motown mais sera le premier groupe blanc à connaitre du succès (grâce à ce titre puisque le reste de la carrière de Rare Earth sera malheureusement plutôt méconnue et anecdotique).
Deep Purple – Child in Time (juin 1970)
Après avoir débuté sur des bases très « psychédéliques » proposant un son entre Pink Floyd et Vanilla Fudge, Deep Purple va s’aventurer sur un terrain beaucoup plus dur sur son quatrième album, le mythique « In Rock ». Grâce à l’arrivée du chanteur Ian Gillan et du bassiste Roger Glover, le groupe entamera un nouveau chapitre de son histoire. « Child In Time » sera un très bel exemple de titre hard rock dans lequel on retrouve cependant encore quelques racines « psychés »…
Ecoutez cette sélection musicale en haute qualité sur Spotify via ce lien: Long Tracks vol 2
La partie 3 de cette sélection « Long Tracks », très bientôt sur laurentrieppi.com …
Voici une sélection perso, et donc subjective, des meilleurs long tracks de l’histoire du rock… Il s’agit d’un article en plusieurs volets, le classement n’est pas qualitatif mais permet de proposer les titres par date de sortie.
Ce n’est pas parce que l’on enregistre un titre de 10 ou de 20 minutes qu’il s’agit d’un titre de qualité, bien au contraire, mais quelquefois, cette formule a fonctionné et a donné naissance à de véritables petits chef d’oeuvres, qui vous font voyager dans une multitude de sonorités, d’ambiances et d’émotions idéales pour de bonnes soirées d’écoute à la maison… Bon voyage …
Les meilleurs « Long Tracks » de l’histoire du rock (partie 1)
1) Rolling Stones – Going Home (avril 1966)
Un des premiers « long tracks » célèbres de l’histoire du rock. « Goin Home » referme magistralement l’un des meilleurs albums des Rolling Stones sortis dans les années 60, « Aftermath ». D’après la légende, cette longue jam des Stones aurait influencé les Doors pour l’enregistrement du mythique « The End ».
2) The Doors – The End (janvier 1967)
Probablement l’un des titres les plus célèbres des Doors, « The End » va prendre forme sur scène alors que le groupe fait ses débuts au Whiskey-A-Go-Go en 1966, club dans lequel il va se produire énormément à cette époque. L’enregistrement de ce morceau légendaire se fera en studio, dans l’obscurité presque totale : seule une bougie permettra aux musiciens de se repérer… C’est également à cause de ce titre que le groupe va se faire virer du Whiskey-A-Go-Go après une prestation particulièrement remarquée durant laquelle Morrison chantera pour la première fois la célèbre phrase oedipienne « Father, I want to kill you, Mother I want to f–ck you ».
3) Love – Revelation (février 67)
Tout comme les Doors, le groupe Love est issu de la scène psychédélique de Los Angeles de la fin des années 60. Arthur Lee, son leader, sera d’ailleurs celui qui présentera Jim Morrison à Jac Holzman, le patron d’Elektra Records, qui signera ainsi les Doors et lancera leur carrière internationale. Pour refermer son second album « Da Capo », Love nous propose cette longue jam psychédélique, d’un tout autre style que le « The End » des Doors mais une jam non moins réussie et envoûtante pour la cause…
4) The Doors – When The Music’s Over (septembre 1967)
Si l’histoire a surtout retenu « The End » comme LE titre des Doors par excellence, Jim Morrison, Robbie Krieger, Ray Manzarek et John Densmore se lanceront dans la création d’un autre « long track » particulièrement efficace sur le second album du groupe, Strange Days, sorti à peine quelques mois après le premier album. Jim Morrison est ici à son apogée créatrice: « Music in your only friend… until the end… »
5) The Chambers Brothers – Time Has Come Today (novembre 67)
Un des sommets dans les « long tracks » psychédéliques, le « Time Has Come Today » nous emmène dans un voyage musical hypnotique, une atmosphère indescriptible signée par ce groupe black qui mélange ici musique gospel, soul et musique psychédélique. Effet garanti! A noter l’utilisation régulière de ce titre dans de nombreux films et séries télévisées : citons notamment le film consacré aux Doors et réalisé par Oliver Stone ou encore les séries « Les Experts » ou encore « Supernatural ».