En septembre, une nouvelle étape s’ouvre dans la célébration de l’héritage de David Bowie : l’inauguration du David Bowie Center à Londres.
Ce centre sera rattaché au prestigieux Victoria & Albert Museum, l’un des plus grands musées d’art et de design au monde. Fondé en 1852, ce musée national – situé à South Kensington – abrite plus de 2 millions d’objets liés aux arts appliqués, à la mode, à la musique, à la photographie et bien plus encore.
J’aurai bien sûr le bonheur d’être présent pour l’ouverture de ce lieu unique, qui s’annonce comme le digne héritier de l’exposition « David Bowie Is », que j’avais eu la chance de découvrir à Londres, Paris et Berlin entre 2013 et 2018… Une expérience inoubliable que beaucoup d’entre vous avaient suivie avec moi à l’époque, à travers photos et récits.
Une première vidéo vient d’être dévoilée, dans laquelle on voit le jeune groupe féminin The Last Dinner Party découvrir avec émotion quelques pièces phares du futur musée : paroles manuscrites, costumes légendaires de l’ère Ziggy Stardust, objets rares… De quoi nous mettre l’eau à la bouche !
Ce centre sera ouvert à toutes et tous, avec la possibilité de consulter certaines archives exceptionnelles pour explorer plus en profondeur l’œuvre de David Bowie, dans toute sa richesse artistique, littéraire et visuelle.
C’est un honneur plus que mérité pour un artiste qui a marqué à jamais l’histoire culturelle du Royaume-Uni… et du monde.
Découvrez la vidéo avec The Last Dinner Party ici :
Quelle émotion lorsque l’on se rend dans ce bâtiment historique et que l’on grimpe des escaliers de plus de trois siècles pour découvrir l’habitat du grand compositeur George Frideric Haendel. Plafonds bas, boiseries anciennes, silence baroque… tout respire le XVIIIe siècle.
Mais vous vous en doutez : c’est l’aspect Jimi Hendrix qui m’a attiré au 23 et au 25 Brook Street, dans cette belle demeure du quartier de Mayfair, au cœur de Londres.
En 1968, Hendrix s’installe ici avec Kathy Etchingham. Ensemble, ils décorent leur nid londonien avec des tapis de chez John Lewis, des tissus orientaux, des objets chinés sur les marchés de Portobello ou Chelsea. L’univers est psychédélique, feutré, résolument personnel.
C’est grâce à Kathy Etchingham, des années plus tard, que la chambre d’Hendrix a pu être reconstituée à l’identique et à son emplacement exact. Un travail de mémoire précieux, qui constitue aujourd’hui le clou du musée.
Un cocon bohème au cœur de la ville
« C’était mon tout premier vrai chez-moi », dira Hendrix à propos de ce lieu.
Une rencontre au sommet… avec Haendel
La cohabitation posthume entre les deux artistes ne manqua pas de faire sourire Hendrix. En 1968, il découvre la plaque bleue apposée sur la façade voisine, en hommage à Haendel.
Il déclarera :
« God’s honest truth I haven’t heard much of the fella’s stuff. But I dig a bit of Bach now and again. » Traduction : Pour être tout à fait honnête, je n’ai pas entendu grand-chose de ce type. Mais j’aime bien un peu de Bach de temps en temps.
Piqué de curiosité, il ira même jusqu’à acheter des enregistrements du Messiah et de Belshazzar chez HMV sur Oxford Street.
La toute première guitare sur sol britannique
À son arrivée à Londres, le 24 septembre 1966, Hendrix est emmené directement chez Zoot Money, figure de la scène de Soho. Là, il attrape une guitare Wandrè “Blue Jean” — marque italienne au design aussi audacieux qu’iconique — et se met à jouer. Cette guitare, toujours exposée aujourd’hui avec ses cordes d’origine, est la toute première qu’il touche sur le sol britannique.
Chez lui, Hendrix se constitue rapidement une collection de plus de 100 vinyles. Il achète ses disques chez One Stop Records, sur South Molton Street, ou les reçoit en cadeau de la part d’autres musiciens.
Les plus usés ? Des disques de Bob Dylan, mais aussi… le Messiah de Haendel. Il adorait Roland Kirk, qu’il fera même jammer dans son salon en 1969.
« Le blues, c’est ce qu’il écoutait vraiment chez lui. Avec un musicien de jazz, il aimait le jazz. Avec un chanteur folk, il aimait le folk. Mais chez lui, c’était toujours le blues. » — Kathy Etchinghan.
Freddie Mercury, fan ultime
Sur place, on découvre trois affiches de concert de Hendrix, ayant appartenu à Freddie Mercury. Ces pièces, récemment acquises lors de la vente aux enchères des effets personnels de Mercury, sont exposées dans la pièce où trônent aussi plusieurs guitares.
Freddie l’a vu plus d’une dizaine de fois d’affilée sur scène. Il le considérait comme son idole absolue, un modèle, une incarnation de ce qu’un outsider pouvait devenir.
Jeune immigré né à Zanzibar, arrivé au Royaume-Uni adolescent, Freddie Mercury voyait en Hendrix une figure d’espoir : la preuve qu’on pouvait, à force de charisme et de talent, renverser les codes et s’imposer.
« Jimi Hendrix était un homme magnifique, un véritable showman, un musicien dévoué. Je traversais le pays pour le voir. Il avait tout ce qu’un rockstar doit avoir : du style, une présence. Il n’avait rien à forcer. Il entrait dans une pièce et tout s’embrasait. » (Freddie Mercury: A Life, In His Own Words)
Hendrix était si important pour lui qu’il le citera dans The Miracle, titre de Queen sorti en 1989, aux côtés de quelques grandes figures de l’Histoire et de la culture.
La Haendel Hendrix House n’est pas un musée classique. C’est une plongée double, fascinante, dans l’intimité de deux artistes visionnaires. L’un baroque, l’autre électrique, mais tous deux habités par la musique, la création, et ce supplément d’âme qui traverse les siècles.