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Sur les traces des Kinks à Muswell Hill, Londres (juillet 2025)

Si vous êtes fans de The Kinks, le nom de Muswell Hill vous évoque forcément quelque chose. C’est d’abord le titre de leur dixième album, Muswell Hillbillies (1971). Mais c’est surtout le quartier verdoyant du nord de Londres où ont grandi les turbulents frères Davies, Ray et Dave.

Dans les années 50 et 60, Muswell Hill ressemblait à un village tranquille, avec ses rues bordées d’arbres, ses pubs et ses petites boutiques. Un décor typiquement anglais, confortable mais parfois étouffant. C’est dans cette atmosphère, entre nostalgie et envie d’évasion, que les Kinks ont façonné leur univers, mélange unique d’observations sociales et de mélodies irrésistibles. Des influences qui feront d’eux les parrains spirituels de formations comme Blur, Kaiser Chiefs ou Franz Ferdinand.

Paradoxalement, leurs racines ne se trouvent pas dans un quartier dur, mais dans cette banlieue moyenne, paisible et bourgeoise.

L’ambiance des pubs britanniques fait partie intégrante de l’ADN des Kinks. C’est donc au Clissold Arms, situé juste en face de la maison familiale, que Ray (16 ans) et Dave (13 ans) donnent leur tout premier concert en décembre 1960. Le concert est organisé par leur père, Fred Davies, un personnage haut en couleur. Toujours jovial malgré ses difficultés financières, Fred jouait du banjo, organisait de grandes fêtes musicales et transformait chaque soirée en un petit cabaret familial.

Ce climat festif, chaleureux et typiquement british imprégnera durablement les futures compositions de Ray Davies.

Quel plaisir que de parcourir les rues de Muswell Hill, sur les traces de cette histoire qui m’accompagne depuis l’adolescence ! Aujourd’hui, le quartier est toujours aussi verdoyant, mais il a changé de visage : plus chic, plus « bobo », avec ses boutiques tendance, ses restaurants cosy et ses magasins de seconde main aux profits caritatifs. Un cadre agréable… mais aux prix immobiliers exorbitants.

Le point d’orgue de ma visite fut évidemment le célèbre Clissold Arms. Impossible de le manquer : une plaque fièrement posée rappelle qu’il est « The Home of The Kinks ». Aujourd’hui, le pub mêle tradition anglaise et spécialités grecques. Le patron, chaleureux, me confie qu’ils sont en lice pour le titre de meilleur pub anglais 2025. Fingers crossed!

Seul petit regret : la fameuse Kinks Room, salle historique où tout a commencé, était ce jour-là privatisée pour un tournoi de backgammon. Heureusement, le propriétaire, compréhensif, négocia mon entrée discrète.

L’espace, préservé dans son jus, respire encore l’époque des débuts : chaises en bois usées, vieux canapé… On imagine sans peine les jeunes Davies et leurs proches assister à ce premier concert, sans deviner qu’ils allaient devenir l’une des plus grandes fiertés britanniques, créateurs de futurs classiques comme « You Really Got Me », « Sunny Afternoon », « Waterloo Sunset », « Lola », « Victoria » et tant d’autres.

Le patron me confie ne pas avoir revu Ray Davies depuis un an et demi, ajoutant qu’à sa dernière visite il « semblait très vieux ». Une remarque qui m’a serré le cœur. Il précise aussi qu’un petit-fils de Ray fréquente régulièrement le pub, et que des concerts hommage aux Kinks y sont organisés.

En sortant du Clissold Arms, impossible de ne pas ressentir cette émotion particulière : celle de se trouver au cœur même d’un lieu où a commencé une légende.

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David Bowie Center à Londres : ouverture en septembre

En septembre, une nouvelle étape s’ouvre dans la célébration de l’héritage de David Bowie : l’inauguration du David Bowie Center à Londres.

Ce centre sera rattaché au prestigieux Victoria & Albert Museum, l’un des plus grands musées d’art et de design au monde. Fondé en 1852, ce musée national – situé à South Kensington – abrite plus de 2 millions d’objets liés aux arts appliqués, à la mode, à la musique, à la photographie et bien plus encore.

J’aurai bien sûr le bonheur d’être présent pour l’ouverture de ce lieu unique, qui s’annonce comme le digne héritier de l’exposition « David Bowie Is », que j’avais eu la chance de découvrir à Londres, Paris et Berlin entre 2013 et 2018… Une expérience inoubliable que beaucoup d’entre vous avaient suivie avec moi à l’époque, à travers photos et récits.

Une première vidéo vient d’être dévoilée, dans laquelle on voit le jeune groupe féminin The Last Dinner Party découvrir avec émotion quelques pièces phares du futur musée : paroles manuscrites, costumes légendaires de l’ère Ziggy Stardust, objets rares…
De quoi nous mettre l’eau à la bouche !

Ce centre sera ouvert à toutes et tous, avec la possibilité de consulter certaines archives exceptionnelles pour explorer plus en profondeur l’œuvre de David Bowie, dans toute sa richesse artistique, littéraire et visuelle.

C’est un honneur plus que mérité pour un artiste qui a marqué à jamais l’histoire culturelle du Royaume-Uni… et du monde.

Découvrez la vidéo avec The Last Dinner Party ici :

https://www.youtube.com/watch?v=5s0Fg3aliOo&t=447s&ab_channel=V%26AUpNext

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Haendel & Hendrix: deux génies, deux siècles, une même adresse

Haendel & Hendrix : deux génies, deux siècles, une même adresse

📍 Mayfair, Londres – 23 & 25 Brook Street Handel Hendrix House

Quelle émotion lorsque l’on se rend dans ce bâtiment historique et que l’on grimpe des escaliers de plus de trois siècles pour découvrir l’habitat du grand compositeur George Frideric Haendel. Plafonds bas, boiseries anciennes, silence baroque… tout respire le XVIIIe siècle.

Mais vous vous en doutez : c’est l’aspect Jimi Hendrix qui m’a attiré au 23 et au 25 Brook Street, dans cette belle demeure du quartier de Mayfair, au cœur de Londres.

En 1968, Hendrix s’installe ici avec Kathy Etchingham. Ensemble, ils décorent leur nid londonien avec des tapis de chez John Lewis, des tissus orientaux, des objets chinés sur les marchés de Portobello ou Chelsea. L’univers est psychédélique, feutré, résolument personnel.

C’est grâce à Kathy Etchingham, des années plus tard, que la chambre d’Hendrix a pu être reconstituée à l’identique et à son emplacement exact.
Un travail de mémoire précieux, qui constitue aujourd’hui le clou du musée.

Un cocon bohème au cœur de la ville

« C’était mon tout premier vrai chez-moi », dira Hendrix à propos de ce lieu.

Une rencontre au sommet… avec Haendel

La cohabitation posthume entre les deux artistes ne manqua pas de faire sourire Hendrix. En 1968, il découvre la plaque bleue apposée sur la façade voisine, en hommage à Haendel.

Il déclarera :

« God’s honest truth I haven’t heard much of the fella’s stuff. But I dig a bit of Bach now and again. »
Traduction : Pour être tout à fait honnête, je n’ai pas entendu grand-chose de ce type. Mais j’aime bien un peu de Bach de temps en temps.

Piqué de curiosité, il ira même jusqu’à acheter des enregistrements du Messiah et de Belshazzar chez HMV sur Oxford Street.

La toute première guitare sur sol britannique

À son arrivée à Londres, le 24 septembre 1966, Hendrix est emmené directement chez Zoot Money, figure de la scène de Soho.
Là, il attrape une guitare Wandrè “Blue Jean” — marque italienne au design aussi audacieux qu’iconique — et se met à jouer.
Cette guitare, toujours exposée aujourd’hui avec ses cordes d’origine, est la toute première qu’il touche sur le sol britannique.

Ce jour-là, il rencontre aussi Kathy Etchingham (retrouvez ma récente interview avec Katy Etchingham ici). Le début d’une nouvelle vie.

La bande-son intime d’un génie

Chez lui, Hendrix se constitue rapidement une collection de plus de 100 vinyles. Il achète ses disques chez One Stop Records, sur South Molton Street, ou les reçoit en cadeau de la part d’autres musiciens.

Les plus usés ? Des disques de Bob Dylan, mais aussi… le Messiah de Haendel. Il adorait Roland Kirk, qu’il fera même jammer dans son salon en 1969.

« Le blues, c’est ce qu’il écoutait vraiment chez lui. Avec un musicien de jazz, il aimait le jazz. Avec un chanteur folk, il aimait le folk. Mais chez lui, c’était toujours le blues. » — Kathy Etchinghan.

Freddie Mercury, fan ultime

Sur place, on découvre trois affiches de concert de Hendrix, ayant appartenu à Freddie Mercury. Ces pièces, récemment acquises lors de la vente aux enchères des effets personnels de Mercury, sont exposées dans la pièce où trônent aussi plusieurs guitares.

Freddie l’a vu plus d’une dizaine de fois d’affilée sur scène. Il le considérait comme son idole absolue, un modèle, une incarnation de ce qu’un outsider pouvait devenir.

Jeune immigré né à Zanzibar, arrivé au Royaume-Uni adolescent, Freddie Mercury voyait en Hendrix une figure d’espoir : la preuve qu’on pouvait, à force de charisme et de talent, renverser les codes et s’imposer.

« Jimi Hendrix était un homme magnifique, un véritable showman, un musicien dévoué. Je traversais le pays pour le voir. Il avait tout ce qu’un rockstar doit avoir : du style, une présence. Il n’avait rien à forcer. Il entrait dans une pièce et tout s’embrasait. »
(Freddie Mercury: A Life, In His Own Words)

Hendrix était si important pour lui qu’il le citera dans The Miracle, titre de Queen sorti en 1989, aux côtés de quelques grandes figures de l’Histoire et de la culture.

La Haendel Hendrix House n’est pas un musée classique. C’est une plongée double, fascinante, dans l’intimité de deux artistes visionnaires.
L’un baroque, l’autre électrique, mais tous deux habités par la musique, la création, et ce supplément d’âme qui traverse les siècles.

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