Archives mensuelles : mai 2013

Mick Harvey, l'ancien bras droit de Nick Cave, se dévoile dans "Four: Acts of Love"

« Four: Acts of Love » est le cinquième album solo de Mick Harvey, le guitariste et multi-instrumentiste complice de Nick Cave pendant près de 40 ans. En 2009, Harvey a quitté Cave et ses Bad Seeds pour se concentrer sur ses projets solo. « Four: Acts of Love » est le second album à sortir depuis ce départ très médiatisé.

Deux ans après le très bon « Sketches from the Book of the Dead », Mick Harvey revient avec ce très inspiré « Four: Acts of Love ». Les fans de Nick Cave et de PJ Harvey, avec qui il a également collaboré intensivement, seront ravi de retrouver le son si particulier de ce musicien ultra-doué. On prend plaisir à écouter cette voix mature qui sent le vécu. Mention particulière pour Glorious signé par PJ Harvey ainsi que la reprise de The Story of Love du groupe de punk australien The Saints. Harvey rend aussi hommage en reprenant avec beaucoup de tendresse le Wild Hearts (Run Out of Time) de Roy Orbison et fait ainsi un clin d’oeil à Van Morrison en reprenant son « The Way Young Lovers Do ». Un album profond et ample.

Note: 4/5

A écouter avant tout: Glorious,  The Story of Love, Summertime In New York, Wild Hearts.

Dans le même genre: Nick Cave, PJ Harvey, Leonard Cohen, Scott Walker

A noter que Mick Harvey fera son retour en album en fin d’année avec une compilation reprenant tous les titres de Serge Gainsbourg qu’il avait repris dans la seconde moitié des années 90. Une sortie à tenir à l’oeil

Partager

Daft Punk: les robots de plus en plus humains?

Random Access Memory marque le retour de Daft Punk après 8 ans d’absence. L’album étonne, ravit ou déçoit, le moins que l’on puisse dire c’est que malgré son grand succès commercial depuis sa sortie, l’album divise. D’un côté les fans des débuts se sentent trahis et de l’autre un tout nouveau public découvre la musique du duo français. Zoom sur un album qui ne passe pas inaperçu…

L’attente a été longue depuis la sortie de Human After All en 2005, mais ce « break » a permis à Thomas Bangalter et Guy-Manuel de Homem-Christo, les deux humains qui se cachent derrière les casques, de redéfinir leur musique et de peaufiner un album ambitieux. Le morceau qui ouvre l’album porte un titre évocateur de la philosophie de ce quatrième album de Daft Punk: « Give Life Back To Music » (rend vie à la musique). Il semblerait qu’il y ait une sorte d’évolution naturelle dans la carrière du duo, des débuts très électros et purement enregistrés à deux à cet album qui se révèle être un album sur lequel il s’entourent de nombreux collaborateurs.

Daft Punk nous  propose donc de rendre la vie à la musique, notamment en s’accompagnant pour la première fois de leur carrière de guitaristes, de bassistes et de batteurs, que des grands noms du genre (notamment le batteur Omark Hakim, connu entre autres pour avoir accompagné Bowie sur l’album « Let’s Dance » ou encore Sting à plusieurs reprises mais aussi le bassiste Nathan East, fidèle collaborateur de Phil Collins, Eric Clapton ou encore d’Herbie Hancock). Même si les masques sont toujours au rendez-vous, les deux musiciens robots semblent se dévoiler, s’humaniser de plus en plus.

Ils ne le cacheront pas en interview, les deux Daft Punk ont écrit, conçu et enregistré cet album avant tout pour se faire plaisir à rendre hommage à la musique et aux artistes qui les ont influencés sur leur longue route musicale.

Un très bel hommage est rendu à Giorgio Moroder, pape du disco qui a propulsé notamment les carrières de Blondie ou de Donna Summer. On peut l’entendre raconter son parcours dans le titre qui porte son nom. Émotion et passion sont au rendez-vous dans ce titre.

Nile Rodgers, de Chic, est venu soutenir le duo en assurant la guitare sur trois excellents titres: « Get Lucky », le premier single issu de l’album, mais aussi « Give Life Back To Music » et « Love Yourself To Dance ».

Autre nouveauté, en plus de retrouver un groupe, on retrouve plusieurs chanteurs. Si certains titres bénéficient toujours de voix synthétiques désormais « classiques », on retrouve sur l’album le rappeur Pharell Williams sur deux titres ainsi que Julian Casablancas des Strokes, Todd Edwards ainsi que le retour plutôt inattendu de Paul Williams, dont les amateurs de films cultes des années 70 se souviennent puisqu’il était le chanteur de la BO de l’étrange « Phantom Of The Paradise » de Brian De Palma, très en forme sur le très bon et presque progressif « Touch ».

Album hommage à la musique d’une autre époque, Daft Punk y propose des sonorités de funk, de soul, de jazz, de musique électronique et parfois même de rock progressif. On pense bien entendu à Chic, mais aussi parfois à Steely Dan, Sébastien Tellier ou encore Air.

Cette « humanisation » de la musique de Daft Punk me fait penser à une interview que je lisais récemment à propos de la Trilogie Berlinoise de David Bowie. Dans celle-ci, le journaliste demandait à Bowie à quel point Kraftwerk avait été une influence pour lui. Le caméleon répondait alors qu’effectivement le groupe allemand l’avait inspiré dans son travail mais qu’il avait eu besoin de donner plus de vie à la musique en insistant sur le son de batterie joué par un véritable batteur et non par une boite à rythme comme le faisait Kraftwerk pour donner un caractère plus « humain » à son oeuvre. En évoluant de cette façon, Daft Punk se rapproche – d’une certaine façon – de la méthode Bowie. Et la réaction des fans les plus puristes, qui se sentent trahis par ce revirement musical, rappelle d’une certaine manière celle des fans de Dylan quand, ce dernier, avait « électrisé » sa musique dans la moitié des années 60, mettant de côté l’aspect « folk acoustique » plus pur de ses premiers albums.

Daft Punk a évolué, ça peut plaire ou ne pas plaire, mais personnellement j’ai beaucoup apprécié ce voyage – certes nostalgique – mais ô combien séduisant auquel le duo français nous invite ici.


Partager

Ray Manzarek, le clavieriste des Doors, nous a quittés

C’est avec une grande tristesse que j’ai appris ce matin la disparition soudaine de Ray Manzarek, le claviériste des Doors. C’était grâce à l’incroyable symbiose musicale, spirituelle et poétique entre Ray Manzarek et Jim Morrison que les Doors sont nés sur une place de Venice Beach en Californie en 1965…


Et si Ray  n’avait pas été là…

Bien entendu, quand on pense aux Doors, on se souvient tout d’abord de la voix et de l’incroyable charisme de Jim Morrison, mais si l’on veut évoquer le son des Doors, on songe tout de suite au son du clavier. En effet, si la guitare est un instrument présent dans les chansons des Doors, elle avait plutôt un rôle d’accompagnement. Le son des Doors, c’était Ray Manzarek …

Outre le fait d’être un formidable musicien, Ray Manzarek a été un véritable pilier, un fondateur du groupe. Il est fort probable que si Manzarek n’avait pas été là, James Douglas Morrison ne serait jamais devenu Jim Morrison …

L’origine des Doors remonte à une promenade sur la plage à Venice Beach, à Los Angeles, en Californie. Jim Morrison et Ray Manzarek sont deux condisciples de l’UCLA, l’université de Los Angeles, où ils sont tous deux étudiants en cinéma. On est en 1965 et les deux musiciens discutent de leurs passions communes : le cinéma bien sûr, mais aussi le blues et la poésie.

Jim avoue à Ray qu’il a écrit quelques poèmes mais qu’il ne sait pas encore trop quoi en faire. Manzarek demande à Jim de lui réciter un de ceux-ci, Jim, encore assez réservé à cette époque commence à entonner : « Let’s swim to the moon, let’s climb through the dire … »

Ce poème, c’est « Moonlight Drive »… Manzarek est impressionné et touché par ce qu’il entend et lui  dit, tout de go, « pourquoi ne viendrais-tu pas chanter ton poème dans mon groupe ? » Chanter ? James Douglas Morrison ne l’avait jamais vraiment envisagé mais… pourquoi pas ? Début d’une grande aventure …

La symbiose Manzarek/Morrison


Une véritable symbiose musicale, spirituelle, philosophique unissait Jim Morrison et Ray Manzarek. Les deux hommes parlaient le même langage et Ray Manzarek pouvait traduire  – comme personne d’autre –  les mots de Morrison en musique. Manzarek était véritablement le chef d’orchestre du groupe. Sur scène, en plus d’assurer les parties claviers, il assurait les sections basses de la main gauche. Si Morrison était bien entendu un génie mais n’était assurément pas le membre le plus ponctuel du groupe : il arrivait parfois en retard… voire pas du tout. Parce qu’il s’était endormi après avoir trop bu dans un café ou qu’il n’avait même pas quitté son domicile. Ainsi, lors de quelques concerts, Manzarek a remplacé Jim, jouant du clavier, de la basse avec sa main gauche et chantant à  la place de Morrison.

L’après Morrison

Manzarek, dévasté suite à la disparition de Morrison en 71, n’a jamais voulu tourner la page The Doors. Dans le début des années 70, il a sorti avec Robbie Krieger et John Densmore deux albums studios qui ne marcheront malheureusement pas (« Other Voices » en 1971 et « Full Circle » en 1972). Puis en 1978, il décidera avec les deux autres membres des Doors d’enregistrer un nouvel album, « An American Prayer », dans lequel les musiciens accompagneront « virtuellement » Jim Morrison à l’aide d’enregistrements de récitations de poèmes que ce dernier avait enregistré peu avant de mourir.

Manzarek, par la suite, sortira des albums solos, travaillera avec Iggy Pop, et continuera à se produire sur scène et à rendre hommage à la musique des Doors au sein de différentes formations.

Il aura été fidèle à la musique de son groupe fétiche jusqu’à la fin. Fidèle, il l’a également été dans sa vie privée en partageant la vie de sa femme, Dorothy Fujikawa, jusqu’à ses dernier jours. Manzark l’avait épousée à la fin de l’année 67, à l’époque des débuts de la gloire des Doors. C’est Jim Morrison et sa compagne Pamela Courson qui avaient été les témoins de ce mariage.

Ray Manzarek laisse derrière lui sa femme, son fils Pablo ainsi que trois petits-enfants : Noah, Apollo et Camille…

Les réactions suite à la disparition de Ray Manzarek

John Densmore aujourd'hui

Le monde de la musique a bien entendu réagi à cette tragique disparition. Le guitariste Slash a été le premier en déclarant sur Twitter : « Je ne trouve pas les mots. The Doors représentait le son de Los Angeles pour moi »

Ray Krieger, le guitariste des Doors et grand ami de Manzarek, a déclaré : « J’ai été profondément attristé d’apprendre la disparition de mon collègue et ami Ray Manzarek. Je suis juste heureux d’avoir eu l’occasion de jouer des titres des Doors à ses côtés lors des dix dernières années. Ray occupait une énorme partie de ma vie et il me manquera beaucoup »

Le batteur des Doors, John Densmore, avec lequel Manzarek n’entretenait plus spécialement de bonnes relations a déclaré ceci : « Il n’y avait pas d’autre claviériste dans le monde plus approprié que Ray pour appuyer les mots de Jim Morrison. Ray, je me sentais en totale synchro avec toi musicalement. C’était comme si nous ne formions qu’un esprit et qu’on portait la fondation sur laquelle pouvaient s’appuyer Jim et Robby. Tu me manqueras, mon frère de musique … »

Partager